La lettre de Chabannes


Cet exercice est le n° 4 du cahier de M. Yves Maubant.

Nous le complétons par une réflexion sur le personnage de Chabannes dans la nouvelle.

 

Lambert Wilson dans le film de B. Tavernier (2010)


 

Réflexion et écriture d'invention sur le personnage du film


Considérant que cette lettre est l'un des éléments les plus marquants de la fin du film, voici quatre exercices possibles qui en prolongent l’intérêt.

[Voix off : 1h54’28’’-1h56’, à l’image : écriture sur la table de l’auberge puis les préparatifs de la Saint Barthélémy]

Princesse, très chère Marie, enfant,
Si je prends aujourd’hui cette liberté de vous écrire comme j’ai pris celle de vous aimer, c’est que, décidé à gagner Maucombe où je m’ensevelirai dans le silence, je me fais un devoir de vous servir une dernière fois. Je crains pour vous, madame. Ayant eu le bonheur de vous examiner tant d’heures, qui vous connaîtrait mieux que moi ? Qui connaîtrait mieux que moi votre dure innocence, jamais offerte, toujours dans le secret, attendant des autres qu’ils vous tirent un cri et rageant s’ils vous y contraignent ? Vous poursuivez seule le voyage de la vie, comme un pèlerin dans les ténèbres. Ne vous trompez pas d’étoile, Marie. Moi je connais la vôtre, à la distance d’une main au dessus de la constellation du Dauphin que nous avons observée ensemble. Je lui ai donné votre nom, et je suis assuré qu'elle est bien vôtre car, dès que je lui parle de ce qui me broie le cœur, elle s’éteint. S’il advenait, comme je le redoute, que vous soyez un jour […]

[Reprise : M. de Montpensier face à Mme de Montpensier, dialogue, 2h07’45’’]

Sachez que rien ne vous assure de la continuité de sentiment de M. de Guise. S’il se présente une occasion plus favorable à ses intérêts [il me semble que c’est bien le cas aujourd’hui] vous le verrez tourner la tête ailleurs.

[Voix off M. de Chabanes, 2h08’29’’, images de fin]

Pour moi, vous m’avez apporté l’émerveillement de la jeunesse : la vôtre, et la mienne tardivement resurgie. Où que je sois, vous m’accompagnerez. Adieu Marie, chère enfant. Le bonheur est une éventualité peu probable dans cette dure aventure qu’est la vie pour une âme aussi fière que la vôtre. Permettez moi de reparaître de temps à autre dans votre souvenir, comme une ces vieilles chansons que l’oubli n’efface jamais vraiment de notre mémoire. Ayant perdu l’estime de votre mari et le cœur de votre amant, au moins vous restera la parfaite amitié de François, comte de Chabanes.

*


1. Lisez la transcription de la lettre de M. de Chabanes à Mme de Montpensier dans le film : quels sont les éléments de la nouvelle qui ont pu nourrir cette lettre ?

2. Atelier de réécriture : entre clichés et lourdeurs syntaxiques ou pléonastiques, voire anachronismes, certains éléments de cette lettre mériteraient d’être repris. Par ailleurs il manque une ou plusieurs phrases : que pouvons-nous faire, que proposez-vous ?

3. « Qui connaîtrait mieux que moi votre dure innocence » : quelle figure Jean Cosmos utilise-t-il ici et qu’est-ce qui la justifie dans la nouvelle et dans le film ?

4. Imaginez que la princesse de Montpensier, par fidélité à la mémoire de M. de Chabanes, décide, symboliquement, de lui répondre pour ensuite lire cette lettre sur sa tombe (une performance théâtrale est possible). Vous veillerez, comme l’a tenté Jean Cosmos (le dialoguiste) à donner à votre lettre tous les caractères de la langue du XVIIe siècle (lexique, syntaxe). Vous serez attentif au caractère parfaitement cohérent avec l’intrigue du film de cette « réponse ». Vous pouvez, après les avoir recensées et en les signalant, reprendre des phases de la nouvelle.



 

Réflexion et écriture d'invention sur le personnage de la nouvelle


Lors de son exil à Champigny, la Princesse de Montpensier  use et abuse du dévouement de M. de Chabannes, au point qu'un jour, excédé, il « s'en alla chez un de ses amis dans le voisinage, d'où il lui écrivit avec toute la rage que pouvait causer son procédé, mais néanmoins avec tout le respect qui était dû à sa qualité, et par sa lettre, il lui disait un éternel adieu. »

Ecrivez cette lettre, en veillant à respecter la situation et les relations entre les personnages de la nouvelle, sans les confondre avec celles du film. Vous pouvez tenter d'intégrer dans cette lettre une allusion à l'un des parcours de la carte de Tendre, et si possible aussi exploiter le Traité des passions de René Descartes, que M. de Chabannes semble avoir lu en pure perte.